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Les contes du réel
24 avril 2017

Les légendes des chevaliers de la quadrature du cercle

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Livre I – Le combat contre la sorcière bleue

Chapitre 1 - Les prétendants au trône

Publié le 24/4/2017

 Situé à l’extrémité occidentale du Vieux Continent le royaume de la Terre des Hommes Francs était réputé dans tout l’univers connu pour le raffinement de sa civilisation et sa douceur de vivre. Les Francs étaient un peuple joyeux et hardi, qui avaient apporté d’innombrables bienfaits à la terre des Hommes Libres et d’abord les concepts de liberté, d’égalité et de fraternité, concepts qu’ils se gardaient bien d’appliquer chez eux. Mais depuis deux générations déjà, un mal mystérieux rongeait la terre des Francs. Ceux-ci perdaient le goût d’entreprendre, les divisions minaient ce peuple jadis si fier et la joie avait désertée la terre des Francs. Nul ne connaissait la nature de ce mal si étrange qui s’était insidieusement installé sur ces contrées naguère si fertiles. Certains incriminaient le Vieux Continent lui-même engagé dans une entreprise d’union sans cesse bouleversée par des élargissements toujours plus lointains, d’autres désignaient une créature redoutable dont l’ombre menaçante s’étendait sur le monde et qu’on appelait tantôt mondialisation, tantôt libre-échangisme.

 Cependant, un mage noir aux pouvoirs ténébreux, soudainement apparu sous le règne de François le Florentin, professait que la cause de tous ces maux provenait d’un ennemi tapi au cœur même de la nation franque. Selon ce mage, venu de la lointaine Armorique, péninsule située aux confins du Royaume, cet ennemi intime était en fait le Sarrasin qui profitait de la légendaire hospitalité des valeureux Francs pour piller leurs richesses et instiller dans leur âme, dégout et accablement. Ce mage était un puissant sorcier versé dans les secrets de la magie la plus noire. Il haranguait les foules en brandissant son œil de verre et son discours transformait de paisibles gens en hordes aux cœurs débordant de haine. Ses partisans, de plus en plus nombreux, battaient la campagne en scandant une formule magique sensée éloigner leurs ennemis : « On est chez nous » et ils avaient adopté comme emblème de leur clan le porc. Ce mage à l’œil de verre avait une fille qu’on appelait la sorcière bleue, versée comme lui dans l’art terrible de la sorcellerie. Elle finit par succéder à son père mais comme il arrive fréquemment chez les mages noirs, la discorde s’installa bientôt dans leur maison et la sorcière bleue chassa son père du château qu’il avait lui-même bâti. Instruite par sa propre conduite, la sorcière bleue éloigna alors de ses terres sa jeune nièce à la figure angélique mais qui avait été initiée depuis son plus jeune âge aux rites les plus sombres de sa famille.

 A la fin du règne de François le Batave, également appelé François l’Indécis, l’épée magique dénommée Election Présidentielle, était soudainement apparue profondément fichée dans la roche sacrée. Plusieurs années auparavant, François le Batave avait vaincu en combat singulier Nicolas le Court, aussi appelé Nicolas l’Agité, en lui assénant une anaphore dont Nicolas le Court ne put jamais se remettre. Ce dernier, qui se voyait plus grand qu’il ne l’était, se rêvait moine consacré à la gloire du Sauveur et finit chanoine de Latran comme tous ses prédécesseurs.

 François le Batave tenta vainement de retirer l’épée légendaire, qui donnait l’onction du Suffrage Universel à celui qui parvenait à l’arracher de la roche, mais rien n’y fit, la magie n’opérait plus, le pouvoir devait changer de main.  Le premier à se déclarer fut le prince François de la Sarthe, dit François le Sinistre, qui avait été grand chambellan de Nicolas le Court. Par une manœuvre hardie effectuée lors d’un tournoi régulier, le prince François réussit à vaincre Nicolas le Court lui-même, toujours affaibli par son ancienne blessure ainsi que le prince Alain de Bordeaux, dit Alain Droit dans ses Bottes, qui fut grand chambellan de Jacques le Roi Fainéant. Mais cette victoire éclatante fut de courte durée et bientôt le prince François se trouva empêtré dans une sordide affaire où son épouse, Dame Pénélope du Pays de Galles, était également impliquée. Le prince François, contraint dans ses mouvements, ne put jamais manœuvrer comme il l’entendait, se heurtant sans cesse à des obstacles mis sur sa route et celle de ses armées par un mystérieux Cabinet Noir dont on ne savait s’il était dirigé par François le Batave, Nicolas le Court ou un mage bien plus puissant. Et c’est ainsi que le prince François de la Sarthe devint François le Sinistré.

 Le second prétendant fut le Tribun des Bois, dit l’Insoumis, qui contrairement à tous les autres princes, en appelait au peuple Franc lui-même et voulait abolir la monarchie pour transformer le royaume bimillénaire en une assemblée des gens. Il se faisait appeler le Furieux et ses proclamations enflammées promettaient de rendre au peuple Franc le goût du bonheur. Malheureusement, le Tribun des Bois ne put conclure une alliance avec le Chevalier du Finistère, dit Benoit le Frondeur, et ceci fut la cause de son échec final.

 Le Chevalier du Finistère avait été un zélé serviteur de François le Batave avant de se retourner contre lui lorsque le Cardinal Manuel de Catalogne, grand prêtre de la laïcité, fut nommé grand chambellan par François le Batave. Le Chevalier du Finistère prétendait gouverner en suivant ses songes qui devaient rendre aux Francs le désir qu’ils avaient perdu. Après avoir vaincu le Cardinal Manuel en tournoi régulier il demanda au Tribun des Bois de se rallier à son panache rose mais bientôt les songes du Chevalier du Finistère devinrent de plus en plus sibyllins pour finir par le conduire à une cuisante déroute.

 Entretemps, avait surgi, venu de nulle part, le prince Emmanuel de Rothschild, dit Emmanuel le Bienveillant. Il se dressa pour signifier que le temps était venu d’une refondation de la nation franque. Se gardant tantôt de sa droite, tantôt de sa gauche, il se tenait sur une ligne de crête difficile à défendre, l’Extrême Centre, jadis terre du Seigneur François du Juste Milieu, dit François le Béarnais, que des revers successifs et de perfides trahisons avaient dépossédé de tous ses biens et qui avait rallié le prince Emmanuel, le faisant ainsi bénéficier de ses conseils avisés.

 Des rumeurs prétendaient que le jeune prince était le fils illégitime de François le Batave. Il avait été éduqué par une enchanteresse, Dame Brigitte, qu’il avait fini par épouser. Il promettait de rendre aux Francs la justice et la liberté qu’ils chérissaient tant. Le prince Emmanuel séduisait par sa jeunesse qui tranchait avec les us en vigueur dans le royaume des Francs où une coutume ancestrale voulait que les prétendants ne puissent accéder au trône qu’à un âge canonique. Son regard clair et son sourire enjôleur étaient le signe manifeste qu’il représentait les forces du Bien dans la formidable bataille qui s’annonçait.

 Car, tapie dans l’ombre, la sorcière bleue attendait son heure. Elle avait recruté toute une armée de mages, polémistes et autres philosophes chargés de relayer son discours aux formules incantatoires afin de préparer son avènement. Tous, ils psalmodiaient le même refrain repris en chœur par les échotiers et autres éditocrates : le déclin de la fière nation franque est consommé.

 Bientôt, sur le champ de bataille ne restait plus que les armées du prince Emmanuel et celles de la sorcière bleue. Tous savaient que le combat serait épique et chacun se préparait à sa manière. Impeccablement alignées, les troupes du prince Emmanuel se réclamaient du Vieux Continent et chantaient de vieilles complaintes, qui parlaient de fraternité et de liberté, tandis que des lignes où se tenaient les hordes de la sorcière bleue, montait une clameur sourde réclamant tout à la fois la mise à bas du système existant et l’avènement de la préférence nationale. La lutte à mort avait commencé et avant la fin de la quinzaine des torrents de sang seraient versés de part et d’autre. Néanmoins, les hommes de bien s’interrogeaient, le sacrifice de tant de vies jeunes et ardentes était-il nécessaire pour rendre aux Hommes Francs la paix et la sérénité auxquels ils aspiraient ? Ne pouvait-on trouver un moyen moins sanguinaire de régler ce conflit dont l’issue pouvait changer à tout jamais le destin de la nation franque, du Vieux Continent et même de la terre des Hommes Libres toute entière ?

À suivre…

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Commentaires
A
Très bien écrit et jubilatoire trancription de l'actualité ! Brillant et drôle.....
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